Oré : Pop étoilée multi-facettes

Oré, autrice-compositrice-interprète, originaire de Metz, passe son enfance à Narbonne. Parents fans de chanson française, de jazz et de rock 70’s, style Led Zeppelin ou Pink Floyd. Oré attaque les cours de piano à 7 ans, mais très vite arrive… le ukulélé. Ukulélé, instrument parfait pour sa praticité. On pense à Israël « IZ » Kamakawiwo’ole chantant Somewhere Over the Rainbow. On pense à Eddie Vedder et à ses Ukulélé Songs. Oré compose au piano et, donc, au ukulélé. Un BTS audiovisuel à Toulouse, de premiers morceaux sortis en 2019, repérée aux iNOUïS du Printemps de Bourges, un passage inoubliable par la Maroquinerie de Paris, et la voici qui sort, le 31 mars dernier, son deuxième EP : Le Spectacle. Après une tournée qui l’aura menée de Lyon à Rambouillet, de Bordeaux à Toulouse, de Montpellier à Annecy, Art’Cade accueillera Oré le jeudi 9 novembre à Saint-Girons aux ORRIS Culturels – 19 heures aux Ateliers de la Liberté. Retour sur une Pop étoilée multi-facettes.

Le Spectacle – EP de la mémoire en liberté

Ce qui marque d’emblée, c’est la douceur. Les contours effilochés de la narration, de la scansion. La sensualité des mots, des intonations, des nappes électro, de ce monde enchanté qui défile en un entrelac de phonèmes et morphèmes si souplement maitrisés. L’espace sonore qui vous happe, qui vous avale, qui vous raconte l’histoire d’une vieille maison pleine de poussière, qui vous explique tendrement la géographie de ces relations intimes en peau de lumière dont on tapisse nos mémoires. Ce qui marque ensuite, c’est le voyage, la profondeur de la descente. Au fil du EP, on plonge au cœur d’Oré. On déambule dans l’intime, sur la ligne de crête où continuent d’exister les gestes évanouis. Cette zone humide qui se nomme « la vie ». Qui se nomme « l’envie ». Chez Oré, dans ses textes, dans ses ambiances, dans ses non-dits, il y a de l’amour en pagaille, des pièces de puzzle éparpillées, des visages d’hommes en femmes, des chiffres, la Méditerranée, des mains frôlées et des tempos lents. On croise du silence bavard, la gymnastique du karma, l’image de toi, un enfant face à la violence, des postures artificielles qui tisonnent les tripes. C’est intime, juste ce qu’il faut. C’est doux, juste ce qu’il faut. C’est touchant, juste ce qu’il faut. Et, Le Spectacle, finalement, c’est Oré dans tous ses états, pas à pas. C’est Oré à livre ouvert, qui enivre et sidère. L’autopsie poétique et terriblement passionnante d’une figure bien vivante et qui assume à en mourir son envie de vie. Sa faim d’un surplus de vie. Dit simplement, à mots doux, à mots soupesés, vivre, c’est profiter de la vie. Vivre, c’est garder sa liberté. C’est faire ses choix sans avoir l’air d’y toucher. C’est éprouver la sensation du sable au bout des doigts. C’est peut-être, aussi, faire le choix de la spontanéité. Et, ici, la spontanéité est bel et bien aux manettes, ruisselante, convaincante. Avec Le Spectacle, Oré se fait moins « rap alternatif » que sur son précédent EP, plus « chanson », plus instinctive dans sa façon de piocher dans la matière sensible de ses compositions. Remarquablement, le résultat est plus fluide, plus limpide, plus feutré. Moins « stressé ». Les chansons semblent résolument assumer leur côté personnel/authentique, en pur mode témoignage au saut du lit, sourire franc au coin des lèvres et petite ritournelle enfantine s’éteignant en tête. On perçoit d’ailleurs, en filigrane, la cohérence d’une artiste qui s’affranchit pour le meilleur des artifices de l’adolescence, des faux-semblants piégeux qui creusent moultes chausse-trappes sur l’incertaine route de l’âge adulte en devenir. Retour du naturel audacieux. Tout doucement. Tout sincèrement. Claquements de langues, de doigts. Chants d’oiseaux pour finir. Alors, oui, en 2023, avec Le Spectacle, Oré semble faire le point, un état des lieux, pour, sous nos yeux, découper sa jeune existence en fines tranches, passer sa fraîche mémoire au mixer, diluer l’amplitude de ses 20 ans magnifiques dans un océan de constats et de remises en question. C’est délicat comme rarement. C’est précis comme trop peu souvent.

Pop et plus si affinités

En définitive, au terme des 8 titres du voyage, la conclusion s’impose : Oré, c’est de la Pop, mais pas que. Oré, c’est une Pop-Électro-Veloutée-Sensible assaisonnée d’un zest d’espièglerie, d’un brin de pensées fantasques, d’un soupçon de nostalgie qui chatouille, d’une pincée de cette drôle de mélancolie acidulée qui fait le sel du vivant. Et Oré obtient enfin, avec cet EP, son premier « premier rôle », son premier « premier grand rôle ». Toujours à la lisière de l’infiniment fragile et du délicatement universel, Oré s’installe et nous impose la brièveté saisissante de l’émerveillement face aux jolies choses. La relève de la Pop à la Française, est là et bien là. Prête, le temps d’un concert unique aux ORRIS Culturels de Saint-Girons, aux Ateliers de la Liberté, jeudi 9 novembre dès 19 heures, à redessiner les contours du monde, de son monde. Et à nous y entraîner avec délice.

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